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Si tu t'appelles mélancolie

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Message par Poet Dim 18 Mar 2007, 13:01

L'intellectuel européen doit-il renoncer à la mélancolie ? Si tu t'appelles mélancolie Hein58
D’Est en Ouest, des intellectuels s’interrogent : que sont devenus leurs combats ? Après “la fin des utopies”, faut-il s’engager à changer le monde, ou à le repenser ? Analyse.


Non, ne partez pas Si tu t'appelles mélancolie BlahBlah02 Il s'agit d'une réflexion très pertinente Si tu t'appelles mélancolie Hein85 (en ces temps de confusion, d'incertitude et d'angoisse qui précèdent des décisions d'orientation qui engagent son pays et nos conditions humaines pour les cinq années à venir)... En tous cas, moi, cet article me fait écho... Alors à vous de juger pour vous... Wink

http://www.telerama.fr/livres/B070313001780.html
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Message par fitzouille Dim 18 Mar 2007, 13:40

il faut repenser nos priorités repenser nous même pour changer
l'utopie peut être constructive si elle n'ai pas réalisé (surtout si elle n'est pas réalisé)
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Message par cosaque Dim 18 Mar 2007, 14:25

Si les intellectuels européens s´attelent désormais à changer quelque chose ce ne sera pas l´Europe. Vers qui se fixent les yeux du sud? Vers l´Europe qui ne pense plus pour elle mais qui pense pour les autres. Pourquoi bâtir de nouvelles théories alors que l´Europe d´est en ouest ne s´épanouit que dans le système capitaliste, les orgies de consommation matérielle. Les ex du bloc de l´Est s´y vautrent avec délice, les gros géants du reste du monde s´en gavent pour rattraper le retard. Il y aura toujours une poignée d´intellectuels pour vouloir anoblir la pensée mais il y a une idée bien plus forte que de placer la pensée avant le reste. C´est le confort. Et chacun de nous y est sensible. Le confort, le matériel.
Alors maintenant que nous avons le confort car la pauvreté sur notre continent est relative par rapport à " l´autre monde" ce n´est pas maintenant que nous le renierons pour faire marche arrière vers de belles utopies collectives.

Maintenant on pense pour le reste du monde comme on envoie ses troupes pour essayer de régler les affaires délicates des autres.
Et puis, il y a les intellectuels européens qui pensent derrière leur pc sony, dans leur fauteuil de cuir, la pipe bourrée du meilleur tabac, nourris au bio, sirotant leur café nespresso...et puis la cohorte des autres, nous tous, qui consommons du jeux vidéo, du dvd, du numérique, de l´internet. On pense certes mais est.ce qu´on s´engage?
Changer le monde pour quel monde? Un monde sans RTT, un monde sans loisirs, un monde sans vacances, un monde sans confort, un monde sans machines, un monde où l´intérêt pour l´autre prime sur l´intérêt personnel. Ce monde là on a essayé et il est mort pour un bout de temps.
Alors on pense comment nourrir l´Afrique qui rêverait de ne pas penser mais de s´éclater à la Fnac avec les petits blancs, on pense comment juguler les extrémismes religieux qui nous pètent à la figure et qui sont bien nés d´une frustration matérielle.
Alors oui refaisons un joli monde, éteignez vos ordis, vous aussi les intellectuels et allez engraissez vos petits jardins avec le contenu de vos pots de chambres. Mangez moins, faites table rase de l´apparence, des modes, des petits weeks-ends à Venise ou Rome et commencez par vivre comme la lie de l´humanité pour changer le monde.

Il faudrait peut-être penser à sauvegarder notre monde car nous sommes ceux qui attisons le plus la haine.
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Message par Poet Dim 18 Mar 2007, 16:49

l’homo europaeus intellectualis est sujet à cette « tristesse rêveuse » : « Il souffre du monde. Il tente d’exprimer cette souffrance, et finalement il souffre de lui-même parce qu’il peut seulement réfléchir et non agir. » Et son martyre ne s’arrête pas là : comme il ne veut pas « commettre un sacrificium intellectus et faire passer le monde pour meilleur qu’il n’est, il doit rêver et imaginer un monde meilleur. C’est alors que naît l’utopie, ce genre qui accompagne l’éveil de l’Europe à l’époque moderne. »

Je continue de citer : [ l’intellectuel fait l’analyse critique de la réalité mais l’homme politique doit prendre des décisions . L’intellectuel qui agit en politique trahit donc sa vocation principale et se révèle souvent inefficace dans l’action. » Bataille de sentiments : quand il (il est ici fait référence à Bronislaw Geremek, dissident politique polonais au sein du groupe Solidarité) pense aux ouvriers polonais à l’origine du changement historique de 1989, « et qui ont payé leur succès d’un coût social très élevé » (la dégradation de leur niveau de vie après les privatisations, NDLR), c’est de « l’amertume » et du« désenchantement » que l’ancien dissident ressent. /.../ Le désenchantement serait politique, la mélancolie culturelle ? C’est l’avis de Patrick Michel, chercheur au CNRS : « A l’Est, la figure de l’intellectuel n’est plus enviable. Elle a très vite cessé de fasciner après la chute du Mur. A Sofia, Budapest ou Varsovie, l’idée qu’on pouvait modifier en profondeur la réalité sociale par la réflexion et le débat politique a cédé la place aux soucis du consommateur, qui s’est vite rendu compte que la démocratie n’entraînait pas forcément un accès illimité aux rayons des supermarchés. Aujourd’hui, on comprend mieux ces sociétés en étudiant leur rapport à la consommation qu’en analysant leur vie culturelle ou politique. En cela, elles nous ressemblent bien ! » /.../ « L’utopie communiste s’est effondrée, réjouissons-nous, mais pas “l’utopie capitaliste”, cette conviction que le progrès de la science et de la technique constitue le moyen infaillible de transformer le monde entier en une vaste société civile universelle. Celle-là, d’utopie, n’a pas disparu. » La science n’a pas cessé de progresser, et avec elle ses effets indésirables, comme le réchauffement climatique. Le destin de l’homme n’est plus assuré, et l’angoisse de Hamlet, métaphysique et romantique, fait un come-back inattendu. Au fond, la mélancolie reste peut-être bien ce qu’elle était : « Une de ses formes ne nous a jamais vraiment quittés , souligne l’essayiste portugais Eduardo Lourenço, auteur de plusieurs études sur LE poète de la mélancolie, Fernando Pessoa, et d’une Mythologie de la saudade. « C’est le sentiment d’accablement de l’homme devant l’énigme du monde, que peint si bien Dürer dans son tableau Melancholia. Ce sentiment a précédé l’invention des sciences modernes, mais il reste prégnant maintenant que l’homme est devenu un “dieu de lui-même”. La science nous promettait un paradis sur terre, elle dessine aujourd’hui une perspective exactement inverse et nous n’avons plus d’utopie à lui opposer. Alors la mélancolie nous envahit de nouveau, nourrie par l’impression que soit l’humanité rebrousse chemin et renonce à son comportement suicidaire, soit elle va à la catastrophe. »
L’important, comme le proclamait l’affiche du film Midnight Express , « c’est de ne pas désespérer ».
« Quel est le mot d’ordre du capitalisme aujourd’hui ? demande le philosophe slovène Slavoj Zizek. C’est : Travaillez, satisfaites bien sagement les exigences du marché, et offrez-vous pour tenir le coup un petit “supplément identitaire” – comme on dirait “un supplément nutritif” . Faites votre boulot et cultivez votre lopin de particularisme – la bouffe ethnique, par exemple, ou la musique corse. Le problème, c’est que lorsqu’on abandonne toute pensée universelle de la condition humaine, on plonge illico dans la mélancolie. »
« Elle (la mélancolie) enrichit sans doute l’individu dans sa vie culturelle, mais elle le paralyse sur le plan politique. C’est un ferment de non-engagement. » complète Geremek.]

En fait, ce sont ces reflexions-là qui m'ont interrogé... La question de départ c'est pas de focaliser sur la représentation qu'on se fait -enfin c'est mon point de vue- de l'intellectualisme, mais comment on réfléchit à notre action individuelle pour s'engager dans notre monde actuel : le changer ou le repenser mais surtout parvenir à s'extraire de ces sentiments que :
y aurait bien des choses à faire mais que ça nous dépasse, que tout s'est barré en couilles et qu'il n'y a plus qu'à observer nos modèles poursuivre leur course folle droit dans le mur et l'explosion ou, vers la dérive et l'implosion... Protester et avoir du vague à l'âme mais sans résister vraiment activement. Se lamenter sur la perte de sa couronne du haut de son rocher dans une bien mauvaise posture et admettre que oui, il y a bien des populations et pays sur d'autres continents qui n'ont jamais eu accès aux conforts et à nos consommations et qui n'ont jamais connu ce luxe de pouvoir se lamenter sur leur sort déchu et qu'il fut un temps où c'est grâce à cette négligence et regards détournés sur leur misère que nous avons bien profité mais que désormais c'est à cause de ce déséquilibre que nous allons finir par comprendre ce qu'est "la vie dure" et la "survie".
Alors que fait-on ou ne fait-on pas ("to do or not to do is to be or not to be") ? La contestation stérile juste pour le fait de contester ou bien encore on se la joue façon cri poing levé Si tu t'appelles mélancolie Encolere7 "Révolution. Y'a qu'à tout faire pêter" qui ne propose rien de concret pour l'après et la reconstruction ?

Pff Si tu t'appelles mélancolie Mecontent01 !
Voilà ce que je constate de mon quotidien au ras du plancher des vaches normandes et des hauteurs de mon pigeonnier... Et désolée de me prendre pour Hamlet ou Pessoa, parfois
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Message par cosaque Dim 18 Mar 2007, 17:16

En fait, ce sont ces reflexions-là qui m'ont interrogé... La question de départ c'est pas de focaliser sur la représentation qu'on se fait -enfin c'est mon point de vue- de l'intellectualisme, mais comment on réfléchit à notre action individuelle pour s'engager dans notre monde actuel

J´ai l´impression que je n´ai pas répondu comme tu le voulais. Pourtant c´est bien parce que les " intellectuels" ont de moins en moins d´impact sur les masses que personne ne bouge. Soit on agit parce qu´on est convaincu par certains discours ou écrits de gens qui nous "remuent" ou que l´on estime, soit on écoute, on gobe de temps en temps une idée mais de là à monter sur les barricades.......
Pourquoi réfléchir à nos actions individuelles? Quand les gens ont envie de faire bouger les choses, ils résistent et ils risquent jusqu´à leur peau de lapin.
Si personne ou presque ne bouge c´est que nos sociétés sont en grande partie satisfaites du monde actuel et qu´aucun discours (de quelque intellectuel que ce soit) n´est en mesure de nous convaincre qu´il s´agit de notre survie.
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Message par Poet Dim 18 Mar 2007, 18:35

Non non, c'est pas ça Cosaque !
Et puis, t'as le droit d'avoir ton opinion à toi Razz
Mais pour répondre quand même à ta remarque, je me dis que si la population dans son ensemble entend par "intellectuels" les BHL et autres FinkielKraut... toujours ces mêmes soit-dits experts qu'on invite à venir donner leur opinion sur tout et n'importe quoi dans les medias et sur les plateaux-repas TV,eh ben, au secours 😕 , tu m'étonnes qu'on entend pas la pensée des penseurs (et je te parle même pas des sociologues enjoués ou pas Wink ) et que ça n'effleure pas les gens dans leur majorité de prendre de la hauteur sur ces questions au lieu de se contenter des "brêves de comptoir" ou des conversations de bureau (j'en sais quelque chose) qui s'essaient à commenter pourkoi c'est-y que ça va de plus en plus mal au travail à cause des délocalisations et pourquoi que je dois dépenser de plus en plus de sous pour mes dépenses "de base" mensuelles :scratch:

Tu connais cette prière ?

Notre chef qui êtes odieux
Que le travail soit léger,
Que les patrons partent en vacances,
Que notre volonté soit faite,
Au bureau comme à la maison,
Donnez-nous aujourd'hui un jour de RTT,
Pardonnez-nous nos absences,
Comme nous pardonnons aussi
À ceux qui nous font travailler.
Ne nous soumettez pas aux heures supplémentaires,
Mais délivrez-nous du stress.
Car c'est à vous qu'appartient le pouvoir,
D'augmenter notre salaire et nos jours de congés,
Tout en diminuant notre travail.
Au nom du pèze, du fisc et du Saint-Bénéfice...

Very funny is'nt it ?

Les gens qui luttent et tentent de résister, ce sont encore les ouvriers parce que eux n'ont plus rien à perdre quand leur usine est fermée et réinstallée dans les "pays émergents à faible couts salarials" ; que c'est tout un pan de leur vie professionnelle passée souvent dans la même boîte et de leur vie tout court qui est balayée et perdue.
Désormais, ils vont devoir tenter de se recaser ailleurs et découvrir les joies du parcours du combattant pour retrouver un emploi et se voir déclassé...
C'est chacun sa merde dans notre société frileuse et individualiste. On a tellement peur que ça tombe sur nous que ça pétrifie et que les gens dans leur fort intérieur remercie le ciel que ça ne soit pas encore leur tour et que c'est chez le collègue qu'arrive la lettre de licenciement... Et personne ne bouge donc...
Pendant ce temps-là, ce sont les actionnaires aux gros cigares qui se frottent les mains en regardant le cours de la bourse et la courbe de leurs actions...
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Message par badtrip Lun 19 Mar 2007, 06:28

Je ne suis pas sure de comprendre, mais vous avez l'air de dire qu'il faut être pauvre pour être un bon intellectuel.
ça tombe bien: les intellectuels français sont miséreux. Pas ceux de la télé, de la gauche caviar et de la consommation, que critique Cosaque; mais les jeunes - les moins de 45 ans.
Je veux dire que le débat sur "les intellectuels" est faussé parce que le pouvoir intellectuel a été confisqué par une génération, qui scie la branche elle-même en prétendant qu'après elle, il n'y a plus de pensée. Ce qui est clair, c'est qu'après elle il n'y a plus de postes en fac, de places dans l'édition, de budgets dans le cinéma, etc.

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Message par La-garance-voyageuse Lun 19 Mar 2007, 14:00

Un livre à lire peut-être :

"Dix raisons (possibles) à la tristesse de pensée" de Georges Steiner
Albin Michel, collection Idées, 15 €; (édition bilingue).

4ème de couverture :

"Si nos processus de pensée étaient moins pressants, moins crus, moins hypnotiques, nos déceptions constantes, la masse grise de la nausée nichée au coeur de l'être, nous désempareraient moins. Les effondrements mentaux, les fuites pathologiques dans l'irréalité, l'inertie du cerveau malade peuvent, au fond, être une tactique contre la déception, contre l'acide de l'espoir frustré. Les corrélations manquées entre la pensée et réalisation, entre le conçu et les réalités de l'expérience, sont telles que nous ne saurions vivre sans espoir. "Espérer contre tout espoir" est une formulation forte, mais en définitive accablante de la brunissure que la pensée jette sur la conséquence."

Page de garde :

"Telle est la tristesse inséparable de toute vie finie, (…) une tristesse (…) qui jamais ne devient effective et sert à donner la joie éternelle de la sumonter. De là viennent le voile d'affliction qui s'étend sur la nature, la mélancolie profonde et inaltérable de toute vie.

Il n'y a donc de vie qu'en la personnalité : or, toute personnalité repose sur un fond obscur, qui doit servir de fond à la connaissance."

Schelling, De l'essence de la liberté humaine
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Message par Poet Lun 19 Mar 2007, 19:12

Si tu t'appelles mélancolie Hein62

Si tu t'appelles mélancolie Penseur

Depuis quand la pierre pense ?
La pierre ponce oui, mais elle pense à que dalle Si tu t'appelles mélancolie Image_22
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Message par TARADITA Lun 19 Mar 2007, 21:27

Oh une petite pierre à votre édifice édifiant...Savez-vous comment lutter contre les noires humeurs de Sainte mélancolie?

Spoiler:
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Message par TARADITA Lun 19 Mar 2007, 21:58

En effet, les médecins de l'Antiquité et du Moyen-Age recommendaient à leurs patients moroses une bonne cure de salades sauvages! Le lait présent dans les lactuca sauvages cueillies au début du printemps était sensé dissiper les pensées sombres et obscures qui s'étaient accumulées durant l'automne et l'hiver. Mais je m'égare, ce topic est en effet trés gambergeant. Plus j'y pense et plus l'idée me poursuit que la mélancolie et sa copine l'éternelle-insatisfaction-devant-notre-sort sont en fait notre marque de fabrique fondamentale à nous petits humains fragiles. C'est aussi en quelque sorte le moteur de notre fulgurante évolution Exclamation , de nos redoutables inventions prêcheur et de notre perte aussi mur .

Que faire alors? Sinon déguster avec spiritualité les petites laitues printanières en faisant gaffe de ne pas avaler les divins mollusques :escargot: tels de vulgaires pépins...
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Message par Poet Lun 19 Mar 2007, 22:31

Est-ce que ça aurait donc un rapport avec l'expression "raconter des salades" ? Si tu t'appelles mélancolie Popotita
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Message par ancolie_sous la pluie Mar 20 Mar 2007, 13:07

Est-ce que les intellectuels racontent des salades ?

Je ne crois pas, pas forcément en tous cas, même si c’est l’impression qu’ils donnent quand ils s’intéressent de trop près à leur nombril. Après tout, ils ont le droit : puisqu’ils sont là pour penser le monde et s’ils ont le sentiment de faire partie de ce monde, pourquoi ne pas s’interroger sur soi et sur son action sur le monde ?

Mais c’est quand même agaçant cette propension à se regarder penser. Tout en regrettant de ne pas pouvoir agir ! C’est l’effet que m’a fait cet article au début, qui reprend divers points de vue d’intellectuels sur la fonction de l’Intellectuel occidental. Il y en a un qui m’a plu, Slavoj Zizek. Une phrase de lui que tu n’as pas citée, Slpoet :

"Je vais encore passer pour un stalinien (…) mais cette mélancolie d’intellectuel de gauche “pragmatique” est la principale forme de trahison de la pensée aujourd’hui."

C’est même un peu ridicule, ce nombrilisme intellectualiste qui entretient l’immobilisme… Appeler cela de la mélancolie est abusif à mon goût, une façon d’ennoblir une position absurde et déraisonnable. Une façon oui de s’asseoir et de se regarder en Penseur parce que décidément c’est joli.
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Message par Nonette Mar 20 Mar 2007, 20:53

Lu dans le Charlie Hebdo de la semaine dernière, qui est devenu une grosse bouse au demeurant, ces saintes paroles destigmatisant la "figure de l'intellectuel" [perçu lorsqu'elle l'est comme nombriliste, allant se droitisant, ou absente carrément du paysage] qui tend de plus en plus à en prendre plein son grade à grands coups de constat d'inutilité de son rôle au nom d'une philosophie de l'action-sans-la-pensée (mouarf), de bouleversement du paysage idéologique, de la société du spectacle médiatique et je le crois fondamentalement de la victoire du système libéral qu'évoque Cosaque -la satisfaction des besoins (crées et recrées) en permanence de consommation, dans un genre de relation avec le monde passant par le seul prisme de la défense mes intérêts privés. J'pense que ça amène de l'eau au moulin de la réflexion initiée, sorry si c'est un poil long, j'ai pris tout de même le temps de le recopier a manus, et sincérement ça vaut le coup. Donc c'est Elisabeth Roudinesco qui cause, interviewée par Stéphane Bou.

Morceaux choisis


Répondant à une question sur le virage à droite de certains intellos (genre Finkie et Glucksman) ou la disparition des intellectuels ?
L'engagement d'un intellectuel ce n'est pas le bulletin de vote mais le travail sur toutes sortes de grands problèmes politiques. Autrefois, on n'interviewait pas les 'intellectuels engagés' pour leur demander pour qui ils votaient ! La question ne se posait pas du tout comme ça. Cette liste d'intellectuels et d'écrivains qui figure sur la couverture du Nouvels Obs, c'est un peu tout et n'importe quoi. Cela ressemble (...) à la couverture de sept. 2005 où l'on faisait l'apologie de ce livre inepte (le Livre Noir de la psychanalyse) et où l'on accusait Freud d'être un escroc et les psychanalystes d'être les responsables d'un goulag, tout cela au nom de 'la science' et sans la moindre preuve. C'est la même confusion. Les médias 'manichéïsent' le débat. Alors que les affrontements intellectuels sont compliqués, les médias obligent à un simplisme...

Le pb, selon vous, ne tient pas tant à l'état du débat intellectuel qu'à son traitement par les médias ?
Aujourd'hui, on est arrivé à ce paradoxe : le travail intellectuel existe mais, périodiquement, l'opinion pense et dit qu'il n'y a plus d'intellectuels (sous-entendu, comme avant), qu'ils ne prennent pas de position. C'est faux. Mais, effectivement, il y a une sorte de dichotomie entre l'image et le rôle auxquels les médias les réduisent (rôle dans lequel ils peuvent parfois se complaire) et ce qu'ils sont en réalité. Contrairement à ce qu'on a tendance à raconter, il y a des intellectuels qui travaillent, même si l'on a l'impression que les grandes figures du siècle passé, de Sartre à Bourdieu et Derrida, n'ont pas été remplacées. Mais tous ces intellectuels ont été consacrés à une époque où il n'y avait pas la télévision et donc où ils avaient beaucoup moins de risques de dire des bêtises à toute allure. Je me rappelle le moment où il y avait une génération de maîtres qui ne voulaient pas aller à la télévision et le moment où, pour la génération suivante, il a fallu y aller. Or, si l'on prend cette habitude, on peut finir par dire n'importe quoi, autrement dit, ce que la télévision veut qu'on dise. Il y a encore en France un 'pouvoir intellectuel' mais aujourd'hui le grand pouvoir c'est les médias où il faut que les intellectuels puissent s'exprimer sans être contraints à trop de simplification.

Si l'on prend les personnages de votre livre Philosophes dans la tourmente leur dénominateur commun c'est la radicalité et la critique du système ou du monde comme il va...
C'est le devoir de tout intellectuel. La définition même d'un intellectuel, c'est la radicalité, mais pas le fanatisme. S'il n'y a pas de radicalité, il n'y a plus d'intellectuel.
(...) De Balibar à Badiou, en passant par rancière, Elisabeth de Fontenay, F. Héritier et bien d'autres encore, si vous considérez les intellectuels importants, cad qui travaillent, vous retrouverez exactement les mêmes engagements, les mêmes débats. La question de la radicalité -l'exigence du maintenir une éthique du sujet contre une politique ambiante qui vise à transformer les gens en objet de consommation- est sans cesse posée.

A quoi alors tient ce sentiment de crise, avec les médias qui remettent régulièrement sur le tapis la question de l'héritage de Mai 68, d'une faillite de l'engagement, d'une droitisation des intellectuels ?
Mais c'est vrai que l'on vit une époque de régression ! On est dans une période de restauration et de reniement qui ressemble un peu à celle de la Monarchie de Juillet où régnait une détestation de la Révolution Française. Aujourd'hui, on a le sentiment qu'il faut détester Mai 68 et partir à la recherche d'un conservatisme. Il y a la haine d'une pensée qui a été rebelle et du coup on voit fleurir dans de nombreux discours un anti-intellectualisme détestable, aux allures populistes. Cela tient à l'échec du communisme réel qui a produit la fascination pour ce nouveau fléau qu'est l'économie de marché obligatoire, posée comme seul horizon possible de la modernité. C'est un nouveau fléau parce qu'il est sans limites. Il va provoquer des effets aussi désastreux que la dérive stalinienne de l'idée communiste. Au fond, quand un système a échoué, on en essaie un autre de manière fanatique. Dans ce contexte deux solutions. Soit on peut rêver de la perpétuation d'un vieux schéma révolutionnaire qui ne marche pas. Soit on peut au contraire, comme Derrida, dire que l'idée de rebellion n'est pas terminée, que nous devons en inventer les nouvelles formes et résister à ce climat ambiant qui est l'acceptation de l'ordre du monde dans ce qu'il a de plus horrible.
(...)

C'est moi qu'ai grasseyé les passages qui me semblent les plus importants.

Nonette
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Message par Poet Mer 21 Mar 2007, 21:09

Merci Madame Elisabeth Roudinesco et ses réflexions, merci à toi Nonette de nous les avoir retranscrits de tes doigts vaillants...
Ça pour vivre une période de régression, on en vit une dur dur .
En tous cas, moi, perso, j'y suis confrontée et ça décline depuis un certain temps que c'est comment qu'on freine... malade
Qu'on a juste ralenti la chute un certain temps mais qu'elle est désormais inéluctable et qu'on est au stade d'être spectateur de son éviction qui s'annonce parce qu'il y a un tel dégoût à travailler auprès de certains individus aux agissements écœurants et déprimants que vous n'avez surtout pas envie de tomber aussi bas qu'eux. Vous n'êtes pas assez rentable et productif et on vous en demandera toujours plus après que vous ayez beaucoup donné même si c'est beaucoup en matière grise et en système D (puisque vous n'avez eu droit à aucune formation dans c'te boutique)...
Et aujourd'hui, on va embaucher du personnel de l'extérieur (après 3 licenciements ces derniers mois) plus qualifié, expert et rapide plutôt que de (re)mettre à niveau et faire évoluer les personnes déjà en place...
So what ? Pourquoi s'accrocher ? À quoi bon l'autodéfense puisque vous savez bien que vous êtes seul(e) face au système, face aux taux horaire, face à la loi "finance" qui est aux commandes et que les collègues laisseront faire jusqu'à ce que leur "tour" soit venu... ou que l'on touche à leurs conditions et poste de travail à eux...

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Message par badtrip Jeu 22 Mar 2007, 08:41

Parmi ces imposteurs, je maintiens qu'il y a aussi une génération "d'intellectuels", les baby boomers, qui monopolisent le discours et font croire que les jeunes (c'est-à-dire les moins de 45 ans!) n'ont rien à dire.
Il y a deux choses distinctes: d'abord la tendance politico-économico-sociale que tu dénonces, SIPoet, et ensuite la possibilité pour les intellectuels d'y réfléchir, et de permettre aux autres de voir un peu plus loin. Or cette possibilité est en France réduite par le fait que certains monopolisent le discours intellectuel. Par exemple Slavoj Zizek représente une nouvelle génération de philosophes, mais ça doit faire 15 ans qu'il est connu dans le reste du monde et on commence à le découvrir en France. L'interview de Roudinesco citée par Nonette est intéressante; mais pourquoi est-ce si rare, un éloge ouvert des intellectuels ? (et de la radicalité, d'ailleurs)

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Message par La-garance-voyageuse Jeu 22 Mar 2007, 14:49

Contrairement à ce qu'on a tendance à raconter, il y a des intellectuels qui travaillent, même si l'on a l'impression que les grandes figures du siècle passé, de Sartre à Bourdieu et Derrida, n'ont pas été remplacées. Mais tous ces intellectuels ont été consacrés à une époque où il n'y avait pas la télévision et donc où ils avaient beaucoup moins de risques de dire des bêtises à toute allure.

Surtout, Bourdieu disais très clairement qu'il ne fallait pas aller sur les plateaux de télé, parce que justement il était impossible dans les conditions actuelles d'utilisation de ce média d'y être entendu, intelligible, intelligent. Il a fait une critique très explicite de ce média dans un petit ouvrage que je vous recommande :

"Sur la télévision" chez Liber
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Message par Poet Jeu 22 Mar 2007, 18:05

Tiens, poursuivons donc avec cet autre lien puisque cette dernière reflexion renvoie à un autre papier que j'ai lu il y a 2 semaines
Si tu t'appelles mélancolie 659108

"Dégâts télévisés"

Invités censurés ou ridiculisés, psychodrames artificiels : “L’arène de France” se transforme souvent en vrai cirque. Dans cette émission diffusée le mercredi soir sur France 2, Stéphane Bern et sa bande confondraient-ils débats et dégâts ?


Invités censurés ou ridiculisés, psychodrames artificiels : “L’arène de France” se transforme souvent en vrai cirque. Sur France 2, Stéphane Bern et sa bande confondraient-ils débats et dégâts ?
Il n’est jamais prudent de glisser un pied dans une arène, fût-elle « de France » et filmée. On en ressort toujours concassé et fourbu. En six mois, l’émission de Stéphane Bern, diffusée chaque mercredi soir sur France 2, a aligné bon nombre de victimes. Parmi lesquelles des invités de marque, dont la production a coiffé le cerveau d’un casque de gladiateur, les contraignant à l’empoignade quand elle leur avait promis un débat. La psychanalyste Amélie Gahete, directrice de crèche et spécialiste de la petite enfance, s’en relève à peine. « J’ai été trompée, censurée, méprisée », dit-elle, d’autant plus en colère que cet exercice télévisuel la rebutait. « Trois journalistes différents m’ont appelée pour me convaincre d’y participer, dont un avec lequel j’ai parlementé au moins deux heures au téléphone, lui expliquant mes réticences en long, en large et en travers. » Elle finit par jeter l’éponge et accepte l’immersion dans la fosse aux lions, sur le thème « Les parents ont-ils démissionné ? », rassurée par la liste des invités. « On m’avait promis qu’il y aurait Philippe Jamet et d’autres psychiatres connus. Quand je suis arrivée sur le plateau, à ma grande surprise, ils n’étaient pas là. Par contre, il y avait Karl Zéro, Caroline Tresca et Hugues Aufray, ce dont on ne m’avait pas prévenue. » La présidente des chiennes de garde, Emmanuelle Messean, a connu la même désillusion, autour de la question « La société est-elle devenue pornographique ? » : « On m’avait cité des invités d’un bon niveau intellectuel, telle la philosophe Michela Marzano (contactée par la production, elle n’a finalement jamais donné suite, NDLR). Or, sur le plateau, sur qui je tombe ? Maïté ! »

Ainsi fonctionne « l’infotainment » ­– l’information matinée de divertissement –, concept en vogue dont cette émission se réclame, en mêlant l’intello au people, le quidam au politique, avec l’ambition de tirer la parole vers le haut alors que la réalité, semaine après semaine, ne cesse de démontrer l’inverse. Au centre de cette arène où les discours se valent, l’économiste Jacques Marseille colloque sur les 35 heures avec Florent Pagny et le coiffeur Franck Provost ; le député Patrick Braouzec défend les sans-papiers contre la skieuse Marielle Goitschel et Kenza (dite « du Loft »). Conséquence immédiate – devenue marque de fabrique : ça piaille, meugle, croasse et tempête. Et fait de l’audience (20 % des parts de marché en moyenne). « L’émission reflète l’état actuel de la discussion publique, où l’information vaut moins que l’affrontement, analyse François Jost, théoricien de l’image et professeur à Paris-III. L’infotainment s’est radicalisé : sous l’apparence de la démocratie, Bern encourage la vulgarité. »

Sur le mélange des gens, le producteur, Jean-Louis Remilleux, se justifie : « J’aime bien le pape et Madonna, Michel Serres et Florent Pagny, je ne vois pas pourquoi on ne les réunirait pas dans une même émission. La plupart des Français pensent comme moi. » Idem sur le mélange des genres : « Il faut sortir la culture et le divertissement de leurs ghettos respectifs. Si une certaine presse, dont Télérama fait partie, continue de se boucher le nez dès qu’on parle de mélange des genres, bientôt il n’y en aura plus qu’un : un journaliste qui présentera le JT en képi ! » L’arène de France comme rempart au totalitarisme ? Fallait oser.

Cette émission, précisément, ose tout. Des caméras cachées où un faux flic (Sébastien Thierry) ridiculise la France profonde. Et un centre d’appel où un pseudo-standardiste (Patrice Thibaud) multiplie les gags, comme se greffer une fausse patte en peluche à la place de la main pour rebondir sur la confession d’un témoin devenu aveugle à la suite d’une erreur médicale. Cette dernière rubrique vient de sombrer aux oubliettes. « Les débats avaient du mal à supporter ces interventions régulières. Soit ça coupait l’invité dans son élan, soit ça tombait à plat », reconnaît Jean-Louis Remilleux après vingt-trois émissions. Pour le reste, le producteur est persuadé de faire un « divertissement intelligent ». « Le public est ravi, les invités, enchantés à la fin de l’enregistrement. Michel Serres en a un très bon sou­venir, demandez-lui. » Nous l’avons pris au mot. Et, d’après son atta­chée de presse, l’académicien aurait confié « avoir perdu son temps ».
Il faut dire que le dispositif ne brosse pas les invités dans le sens du neurone. Des thèmes de société formulés de la façon la plus poujado-réductrice possible. Des exemples ? « Fumeurs, fraudeurs : faut-il les dénoncer ? », « Faut-il donner tous les droits aux homos ? », ou encore « Faut-il enfermer les psys ? » Un public censé voter pour ou contre avec une télécommande. Et des invités divisés en deux camps, comme pour interdire toute position médiane, ce « oui, mais » de la nuance susceptible d’élever les débats. « Dès qu’on argumente, Stéphane Bern nous coupe la parole pour chercher le clash », explique Emmanuelle Messean, des Chiennes de garde. Et si Bern laisse parler, le montage cisaille pour lui. « On m’avait juré que l’émission était enregistrée dans les conditions du direct, raconte la psy Amélie Gahete, qu’il y aurait au pire deux minutes de coupe au montage. » Dans la réalité, c’est dix fois plus, soit vingt minutes de coupes pour chaque débat. Et toujours au profit du spectaculaire. « J’ai fait un développement sur Freud et Dolto, mais cela n’a pas été gardé. Ils n’ont conservé que mon coup de gueule en fin d’émission, ce qui me fait passer pour une hystérique. En plus, Bern ne m’a ni nommée ni présentée. Ma légitimité a été tronquée, ma parole falsifiée. L’émission instrumentalise les spécialistes, s’en sert comme faire-valoir, c’est très humiliant. »

L’attachée de presse d’un éditeur se souvient de l’enregistrement des premières émissions : « On nous avait vendu du Polac, on s’est retrouvés avec du sous-Dechavanne. » Une autre : « En découvrant la teneur du débat, je me suis décomposée. Je pensais à mon auteur sur le plateau et je me disais : le pauvre, où est-ce que je l’ai embarqué ? » Tout le monde n’est pas aussi sévère avec l’émission. Jacques Attali n’a « pas eu à s’en plaindre », Pascal Boniface l’a vécue comme une saine « récréation ».

En six mois, Bern a accueilli quatre ministres en exercice (dont Renaud Dutreil et Gilles de Robien), une vingtaine de députés, dix intellectuels réputés (dont Philippe Sollers et Emmanuel Le Roy Ladurie) et une flopée de médecins. On a aussi pu apercevoir Francis Lalanne et Danielle Mitterrand, Brigitte Lahaie et Charles Pasqua, Daniel Ducruet et Jean-François Khan, K-maro et Philippe Caubère, Shirley et Dino… Si les plateaux se sont un peu détériorés au fil de l’hiver, avec une pléiade de chanteurs has been, de psychothérapeutes douteux, de seconds couteaux d’associations – une émission « Peut-on rire de tout ? » a même été annulée, faute d’invités –, de récents ajustements permettent à nouveau de séduire des personnalités crédibles. Quoi qu’il en soit, « aucun invité ne participe à un débat si sa présence n’est pas justifiée », nous assure la production.

Sauf exceptions, évidemment nombreuses. Viré du plateau juste avant un débat sur les « vieux » à cause d’un contentieux avec l’invité fil rouge (Yann Moix), le touche-à-tout Frédéric Vignale (1) a été invité de nouveau quelques semaines plus tard sur le thème « Paris contre province ». « On m’a demandé quel camp je préférais défendre, dit celui qui navigue entre Metz et la capitale, j’ai finalement choisi Paris. » Dans les coulisses, les assistants le chauffent : « Lâche-toi, attaque, n’hésite pas à couper la parole ! » Ce qu’il fait, au-delà de leurs espérances. « Le seul moyen d’exister, c’est de tenir ton personnage, quitte à surjouer, raconte-t-il. Moi, je m’étais fait une coiffure de petit con pour coller à l’archétype du Parisien arrogant. A la fin de l’enregistrement, les autres invités sont venus me féliciter, m’ont demandé si j’étais comédien. Suite à l’émission, j’ai reçu 524 e-mails et obtenu un papier dans Technikart. »

Pour parfaire la mascarade, des avocats défendent chaque camp avec la subtilité d’un menhir. Castés par la production sur les vidéos d’un concours d’éloquence célèbre dans la profession, ces jeunes loups du barreau de Paris détournent les ­effets de manches au nom du rire (gras). « Cet exercice de style donne une image partielle, et pas forcément la meilleure, de notre métier », admet Caroline Mecary, membre du Con­seil de l’ordre des avocats de Paris. « Ce sont des clowns, des danseurs de claquettes, des caricatures de ce que la profession ne veut plus être, estime quant à lui Vincent Delmas, président du Cosal (syndicat des avocats libres). Ils véhiculent l’image d’avocats mercenaires qui défendraient n’importe quoi avec des arguments fumeux. Nous, on est obligés de passer derrière pour donner le change dans les médias. »

Depuis deux semaines, des ténors du barreau (Gilbert Collard, Georges Kiejman…) se joignent donc aux jeunes rhéteurs pour insuffler du crédit à ces débats en berne. Echaudée par l’indignation générale suscitée par les premières émissions (même le médiateur de la chaîne refuse d’en parler), la direction de France 2 encourage ce type d’ajustements. Résultat, l’indigence du concept s’estompe peu à peu, révélant une émission tout simplement « bas du front » et standardisée. Loin d’une certaine promesse de septembre, quand France 2 fanfaronnait sur la « formidable émission de débat qui manquait au service public » .

Rolling Eyes :evil:

(1) Il raconte cet épisode dans Les Censurés de la télé (éditions Le Bord de l’eau).

(papier signé Erwan Desplanques)
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